Nous devrions découpler l’urbanisme de la promotion immobilière

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3 min de lecture  |  Publié le 13/03/2023 sur | Mis à jour le 12/05/23

Immobilier : alerte rouge chez les promoteurs

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Elsa Dicharry | lesechos.fr

“La voiture est en panne sur le bas-côté de la route avec les warnings allumés”, a résumé ce jeudi de façon imagée Pascal Boulanger, le président de la Fédération des promoteurs immobiliers.

L’urbanisme opérationnel et nos projets urbains reposent aujourd’hui en très large partie sur la promotion immobilière, sa capacité à bâtir et commercialiser des logements qui répondent à la demande, tout en intégrant une partie de logements sociaux.

Mais ces dernières années, l’écart s’est inexorablement creusé entre ce que cette filière de la promotion est capable de produire comme offre, et la demande :

  • les coûts de production en promotion ont augmenté (rareté et cherté du foncier constructible, hausse coûts de construction), dépassant largement la capacité de financement d’une très grande majorité des accédants, conduisant la promotion à orienter massivement ses produits vers l’investissement locatif soutenu par des dispositifs de défiscalisation ;
  • la demande est de plus en plus exigeante, qualitativement, avec une aspiration aux espaces extérieurs, aux jardins, voire à une maison, tandis que le taux d’effort réalisé par les français pour se loger est sans doute proche de son maximum, et que la hausse des taux vient réduire leur pouvoir d’achat.

Si nous ne pourrons jamais nous passer de la promotion pour bâtir les lieux les plus centraux, les plus intenses et les plus hauts de nos territoires, il est clair désormais que celle-ci ne peut plus être l’outil par lequel l’urbanisme doit chercher à répondre à 80% des besoins en logement des français.

Les macro fonciers et macro lots se feront de plus en plus rares et chers à l’ère du ZAN

Les micro fonciers et micro lots seront, au contraire, disponibles en abondance, pour permettre une densification douce, en auto-promotion :

  • des tissus pavillonnaires et espaces résidentiels peu denses construits ces 100 dernières années, dans les lieux qui sont aujourd’hui devenus stratégiques,
  • des toits de nos villes déjà denses
  • des macro-lots de nos opérations d’aménagement que nous pensions dédier hier à des opérations de promotion immobilière et que nous pourrons dédier demain à des micro-opérations en auto-promotion portées par les habitants eux-mêmes.

Les micro opérations de construction, en auto-promotion ou en micro-promotion, c’est l’histoire de nos villages, mais aussi l’histoire de nos villes historiques, denses, intenses.

Si l’urbanisme veut tourner la page de son 20e siècle, et passer d’un logique extensive à une logique de renouvellement urbain, il faudra organiser son découplage partiel du modèle coûteux de la promotion immobilière.

C’est sans doute le moment de changer de modèle.

D’autoriser massivement la densification douce, comme est en train de le faire l’Amérique du Nord.

Et de financer cette transition plutôt que le sauvetage en catastrophe du modèle d’hier.