« Arrêter de faire grossir les grosses villes » ?

Par
2 min de lecture.  |  Publié le 23/06/2022 sur | Mis à jour le 02/06/23

« La voiture pour tou(te)s ou presque a conduit à faire un urbanisme étalé en conséquence »

par

Laura Foglia | novethic.fr, commenté par Jean-Marc Jancovici | linkedin.com

Merci Jean-Marc Jancovici de mettre le doigt sur cette question : comment seront nous répartis sur le territoire dans 100 ans ? Les « grosses villes » auront-elles encore un sens, une place sur notre territoire, la possibilité de grossir encore ?

→ Tout dépend de ce qu’on entend par « grossir » : si c’est « grandir en nombre d’habitants » et en se densifiant, alors pourquoi pas ; Manhattan et Paris ont connu une vie avant le pétrole, leur urbanisme est un modèle de forme urbaine permettant très peu de « déplacements individuels rapides », avec des transports en commun très efficaces.

→ Il faut se poser la question, anthropologique, et non pas simplement économique, de la raison pour laquelle la population mondiale se concentre aujourd’hui dans les grandes villes :

  • au niveau collectif : une perte de crédibilité des institutions publiques et privées, un effondrement de la confiance des individus envers les structures collectives.
  • au niveau individuel, la recherche d’une forme de « sécurité » (financière, sociale, affective, anthropologique) par l’accès à un grand nombre d’options (professionnelles, de rencontres, d’activités…) que seules les grandes métropoles parviennent à réunir.

Qui est prêt à consacrer 10, 20, 30 ou 40 ans de sa vie professionnelle à un employeur, à un organisme, et donc à déménager là où celui-ci se trouve pour s’y installer à long terme, sans disposer d’autres options alternatives ?

Avant on avait « 1 » emploi dans une vie … Combien en compteront de différents, à l’âge de la retraite, ceux qui ont 20 ans aujourd’hui ?

Et dans quels lieux pourront-ils accéder à ces opportunités ? À cette sécurité que procurent les opportunités ?

Une part importante des nouvelles générations françaises aspirent à vivre dans les grandes villes. Il en va de même à l’échelle mondiale (+2,5 Mds d’urbains attendus d’ici 2050).

On ne peut pas éluder la question anthropologique sous-jacente, et faire comme si la population pouvait d’un coup de baguette se répartir sur le territoire « comme avant ».


Aujourd’hui, à court terme, les règlements d’urbanisme empêchent les populations de se rapprocher des coeurs des grandes agglomérations. Ils empêchent de donner à la 1ère couronne de Paris, de Lyon, de Bordeaux, de Toulouse, la densité urbaine du coeur de ces villes, celle qui permet le métro, le déplacement à pied ou en vélo grâce aux courtes distances. Cette densité qui permet de créer la ville du quart d’heure.


Faut-il s’en remettre à des utopies d’une population répartie (par quel pouvoir ?) « rationnellement » (« comme avant ? ») sur le territoire ? (on a vu, à travers les évaluations récentes, que « l’exode urbain de la crise sanitaire » était un fantasme…)

Ou faut-il ouvrir des options vertueuses à court terme dont on sait qu’elles sont aussi compatibles avec un monde où l’énergie sera rare à long terme ?