En défense des grandes villes denses : la croissance organique

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2 min de lecture  |  Publié le 03/10/2022 sur | Mis à jour le 16/03/23

© Ryoichi Aida

Le tissu urbain organique de Jakarta (35 millions d’habitants), à la fois villageois et métropolitain, est-il l’une des plus belles réussites urbanistiques du 20e siècle ?

Dans l‘article précédent je survolais le cas de Tokyo, une “mégapole villageoise” dont l’essentiel du tissu urbain est formé d’un “océan de maisons” apportant à ses habitants à la fois de l’intimité et un certain dynamisme local, construit par ses habitants ordinaires.

Dans ce même esprit, la performance du tissu urbain de Jakarta est, sans doute, encore plus impressionnante.

Herald van der Linde (auteur de “Jakarta : History of a Misundertood City”, 2020) l’introduit ainsi.

“Jakarta est une ville fabuleuse. Pour beaucoup, cette affirmation pourra paraître étrange. N’évoque-t-elle pas en premier lieu des images d’embouteillages infinis, de centres commerciaux démesurés où l’on ne trouve que des produits similaires, mais aussi, bien sûr, des inondations ?”

“Mais Jakarta est beaucoup plus que le centre politique, économique et culturel de l’Indonésie. Cette métropole étalée de plus de 30 millions d’habitants est un lieu vibrant, énergique et débordant de vie, un immense labyrinthe d’allées et de ruelles où l’on croise des enfants qui continuent d’aller à pied à l’école, des vendeurs de bakso (une soupe avec ses boulettes de viande) et les tenancières de petites boutiques où l’on trouve “tout”, depuis les snacks et plats de pâtes jusqu’aux piles et cigarettes, en passant par la papeterie. On y rencontre également, au grès des ruelles, des barbiers, des magasins de réparation de motos – qui vous promettent des réparations magiques – des courts de badminton, et de petites mosquées.”

“À la nuit tombée, ces petites échoppes s’illuminent, créant une atmosphère conviviale et chaleureuse. Lorsque les soirées sont douces, j’ai pris plaisir à passer du temps dehors, fumant une cigarette kretek que j’accompagnais d’un sateh ou d’un nasi goreng… Cet esprit de voisinage remonte aux jours où ces kampung – aujourd’hui absorbés dans la grande métropole – étaient à l’origine de petits villages installés à l’écart de la ville.”

C’est ce modèle villageois, formé d’allées et de voies étroites et sinueuses, le long desquelles se développe un bâti dense et bas, hyper éclectique, hyper individualisé et approprié, mais aussi hyper végétalisé, qui forme aujourd’hui l’immense majorité du tissu métropolitain de la capitale indonésienne.

Ce qui est exceptionnel, c’est que la description qu’en donne Herald van der Linde en tant qu’habitant, n’est pas uniquement vraie dans les quelques rues ou quartiers les plus animés de la mégapole : il décrit une forme de réalité villageoise quasi universelle, qui s’offre partout aux dizaines de millions d’habitants de la métropole.

Une petite visite via Street View vous convaincra très vite que le tissu urbain de Jakarta est un phénomène qui mérite d’être étudié de plus près !

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