La précarité mobilité : un problème de transports ou d’urbanisme ?

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3 min de lecture.  |  Publié le 31/05/2022 sur | Mis à jour le 31/05/23

©Atlas des Mobilités 2022

Et si on renversait la logique ? Et si on prenait le problème par l’urbanisme plutôt que par le système de transport ?

Selon l’Atlas des mobilités de la fondation fondation Heinrich-Böll, 13.3 millions de Français sont en situation de « précarité mobilité » — qu’elles soient privées de moyen de transport (y-compris d’un abonnement à un système de transports collectifs), soit que leur dépendance à la voiture les mette en situation d’insécurité.

On peut, a priori, agir de 2 façons :

  1. Développer et intensifier l’usage des transports en commun, notamment en zone périurbaine ;
  2. Réduire le besoin de déplacement et les kilomètres parcourus en rapprochant l’habitat des activités.

La 2e option a le mérite d’être simple et radicale : on déplace une fois l’habitat et les locaux d’activité au bon endroit, plutôt que de déplacer tous les jours et ad vitam les individus qu’on a mal localisés ou qu’on a localisés hier, à l’ère du pétrole bon marché.

Se pose les questions suivantes : qui a besoin d’habiter où ? À quoi ressemble une ville ou chacun peut aller travailler en 10 ou 20 min de marche à pied ou de vélo ?

Tout dépend de la structure du marché du travail : dans un monde où l’on travaille 40 ans au sein d’une même entreprise et sur un même site, on peut imaginer un maillage élargi profitant au mieux de l’infrastructure existante des 100 préfectures et 36’000 communes de France.

Mais, dans le monde du travail actuel :

  • Les employés cherchent des opportunités d’emploi en nombre suffisant, et donc une masse suffisante d’entreprises susceptibles de les accueillir ;
  • Symétriquement, les entreprises cherchent des employés, et donc une masse suffisante de personnes employables.

C’est-à-dire que la taille de la « ville » ou de « l’agglomération » qui doit accueillir les uns et les autres augmente ! C’est ce que nous vivons à l’échelle planétaire à travers le phénomène de « métropolisation », qui n’est pas spécifiquement français.

Quel est l’obstacle principal à ce que les activités et les emplois soient rapprochés ?

  • D’abord, le fait que la géographie de l’emploi d’aujourd’hui ne soit pas la même qu’hier, et que de façon corrélée, la géographie du parc d’habitat existant ne soit pas celle dont nous aurons besoin demain. Le monde du travail a beaucoup changé. Bien sûr en nature (hausse de la part des services, recul de celle de l’industrie) mais surtout dans la relation individu – institution. La localisation géographique d’un employeur ne suffit plus à convaincre un ménage de déménager de façon pérenne pour lui.
  • Ensuite, le fait que les grandes villes, dont nous avons besoin aujourd’hui pour accueillir dans des espaces denses à la fois emplois et habitat, soient aujourd’hui gouvernés par les seules personnes qui dorment sur place, et non par celles qui y travaillent (la « démocratie du sommeil »). La conséquence est que ceux qui dorment sur place trouvent qu’ils sont déjà suffisamment nombreux et qu’ils ne souhaitent pas accueillir de nouveaux arrivants.

Une solution : devenir de vrais génies et artistes de la densification et faire en sorte que les villes de demain soient des modèles de durabilité et fassent rêver à nouveau.