Nos villes, dont le verdissement est devenu prioritaire pour leurs habitants à cause du changement climatique, doivent penser aussi aux ressources florales, nectar et pollen (puis fruitières et grainières) qu’elles offrent.
Nous savons que pour la vitalité de la biodiversité, ces ressources doivent être étalées dans le temps et diversifiées.
Les floraisons continues de Paris sont exemplaires : entre arbustes et arbres venus de partout et créations horticoles, les mangeurs de fleurs y sont bien nourris (à défaut d’être tous bien logés !). Elles restent trop peu imitées ailleurs, avec des palettes végétales simples et peu réfléchies, pour cause de routine ou de disponibilité en pépinières.
Retenons la nécessité de privilégier dans nos rues les arbres à belles floraisons, entomophiles1 (les tilleuls, érables ou acacia ) plutôt qu’anémophiles2 (platanes, frênes, chênes…) : ils offrent nectar et pollens riches en acides aminés3.
Bientôt le nutri-score
des villes pourra devenir un critère d’aménagement.
Biodiversité : vers un nutri-score de nos plantations ?
La méthode reste à peaufiner, mais intuitivement on pourrait proposer que chaque kilomètre carré urbain abrite une palette plantée qui, entre arbres et arbustes, assure une fourniture de pollens sur quasiment toute l’année.
En 2016 une étude américaine4 s’est intéressée à identifier les assemblages de plantes les plus utiles pour soutenir les populations d’insectes pollinisateurs victimes de perte de ressources florales en milieux urbains. En étudiant 373 sites sur 4 années et en croisant différents critères (résilience, esthétique, local/exotique, invasif/gérable, calendrier floral, ..), les auteurs avancent — à titre d’exemple pour leur coin tempéré du Kentucky et de l’Ohio — une cinquantaine d’arbustes et arbres pour cette palette du futur.
Leur travaux mettent en évidence des critères qui complèteront sous toutes les latitudes, celui de la de résilience face au climat : diversifier les palettes végétales
Le jardin à l’heure du ZAN : ce n’est pas la quantité de « vert » qui compte
pour étaler les floraisons, aussi préférer les variétés à fleurs simples (le pollen y est plus facilement accessible) et d’éviter les cultivars stériles. Leur étude a fait ressortir quelques champions bien identifiés en matière de ressources florales pour les pollinisateurs : tilleul
Le tilleul oublié
, heptacodium de Chine
La migration de l’Heptacodium
, tetradium ou sumac ailé pour n’en citer que quelques-uns.
Tout arbre résistant au sec, à floraisons précoces (avant mi-avril) ou tardives (après mi-juillet) participe à la solution pour un bon nutri-score de nos plantations urbaines.
Esthétique, curiosité botanique de nos pépiniéristes, paysagistes, jardiniers et urbanistes, et apports de ressources florales se conjugueront pour dessiner les aménagements urbains futurs.
Quelques villes montrent de beaux spots
dont nous pouvons nous inspirer, en voici quelques uns.
Notes :
- Se dit des plantes dont la pollinisation se fait par l’intermédiaire des insectes. Les fleurs des plantes entomophiles ont la plupart du temps des fleurs très nectarifères et/ou très colorées comme stratégies pour attirer les insectes.
- Se dit des plantes dont la pollinisation se fait par l’intermédiaire du vent. Les fleurs des plantes anémophiles sont souvent peu voyantes et peu nectarifères mais produisent beaucoup de pollen (par exemple les chatons des noisetiers ou des saules)
- Somme, L., Moquet, L., Quinet, M. et al. Food in a row: urban trees offer valuable floral resources to pollinating insects. Urban Ecosyst 19, 1149–1161 (2016).
https://doi.org/10.1007/s11252-016-0555-z - Mach BM, Potter DA (2018) Quantifying bee assemblages and attractiveness of flowering
woody landscape plants for urban pollinator conservation. PLoS ONE 13(12): e0208428.
https://doi.org/10.1371/journal.pone.0208428
- Ailanthus altissima sur le site de l’Inventaire du patrimoine naturel de la Région de Bruxelles Capitale