La palette de la seconde chance : Hovenia dulcis

Recherches
Publié le 07/05/25
Mis à jour le 08/05/25
4min de lecture

Dans nos paysages partis pour une grosse  galère  (vers +3 à +4°c, jusqu’à -30% de pluie estivale), redonner leur chance à des  exotiques  écartés, est nécessaire, sauf à s’obstiner à croire ,en dépit de tout, que les  locaux  vont nous rendre des paysages résilients et nourriciers …

La palette du futur doit inclure des renforts. On en connaît, des oubliés, qui méritent une seconde chance.

Parmi eux, Hovenia dulcis, l’arbre à raisins, est un cas d’école.

De la famille des Rhamnaceae (la famille de la Bourdaine, Frangula alnus, arbuste discret de nos sous bois tempérés d’Europe), il est originaire de l’Asie de l’Est (Japon, Chine, Corée) où on le rencontre jusqu’à 2’000 mètres d’altitude (il est capable de résister à des froids jusqu’à -20°C) (figure n°1).

Sur ses terres d’origine, il est valorisé pour son bois, ses dérivés médicinaux qui soulagent le foie1, et ses  fruits , en fait les pédoncules charnus qui portent les graines, à goût de raisin sec (figure n°2).

Introduit en Europe du Nord en 1786, depuis le Japon, il a mal supporté le climat bloquant sa maturation. Chez nous, son avenir a été un même échec dû tant à un manque de diversité des cultivars disponibles, qu’à la difficulté de récolter ses pédoncules charnus de façon rentable2.

Il en fut oublié (il y en a 6 dans Paris3).

Sa carrière est assurée en Corée, où les chercheurs ont quantifié ses ressources florales : un arbre, c’est 20 jours de floraisons, 600’000 fleurs (figure n°3), une production de nectar de 300 kg/ha.

Sa production en nectar, utilement fournie en été, est très supérieure à de nombreuses essences. L’Institut national des sciences forestières à conduit en 2020 une étude sur les périodes de floraison et la productivité nectarifères de 260 essences forestières4. Les résultats ont permis d’identifier des espèces à haut rendement en miel par unité de surface, parmi lesquelles Hovenia dulcis figure en bonne place (figure n°4).

On notera que la recherche forestière au terme d’un travail de sélection mené entre 1996 et 2005 a créé de nouveaux cultivars fruitiers supérieurs : H. dulcis var. koreana Nakai ‘Poong-Sung 1’5 (ainsi que d’autres variétés permettant d’étaler dans la saison les floraisons et la récolte des fruits6). Ce cultivar montre une productivité exceptionnelle, avec un rendement individuel plus de 4 fois supérieur à la moyenne des arbres à hauts rendement précédemment, ce qui en fait une variété prometteuse pour la culture commerciale et l’utilisation médicinale.

Il est temps de redonner sa chance à l’arbre à raisins, en clin d’œil autour de nos vignes, mais pas seulement, tant le manque de ressources estivales devient patent.

Retenons que son adaptation sur tout notre territoire est facilitée par le changement climatique, (les longs étés à venir le font mûrir ; il suivra volontiers les zones à châtaigniers avec lequel il partage la préférence des sols non calcaires), son intérêt nectarifère Biodiversité : vers un nutri-score de nos plantations ? Biodiversité : vers un nutri-score de nos plantations ? évident. Il ne craindra que les longues sécheresses pour la production fruitière. et sa résistance aux longues sécheresses qui ne mettent pas en péril sa production fruitière.

Des mal-jugés, oubliés, il y en a d’autres :

  • Le Tetradium daniellii Arbres et nutri-score urbain Arbres et nutri-score urbain , un arbre oléicole si mellifère ;
  • Le robinier du Nouveau Mexique (Robinia neomexicana), si résistant au sec et à floraison remontante ;
  • Le Châtaignier de Seguin, à floraison continue de juin à octobre et longue fructification utile à la petite faune …

Regardons les arbres avec les attentes du moment, pour nous et la biodiversité ; et sortons les oubliés de nos arboretums devenus des musées alors qu’il devraient servir de vitrines du futur : L’ONF et l’OFB pourrait s’y trouver un objectif commun.


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Figure n°1 : Hovenia dulcis dans un jardin potager en corée. A taille adulte l’arbre peut atteindre une dizaine de mètres de haut pour 6 à 8 mètres d’envergure

Pietro Scolorato | flickr.com
Figure n°2 :Pédoncules comestibles de Hovenia dulcis au jardin botanique du Lycée scientifique “Filippo Brunelleschi”, Afragola, Italie. Les pédoncules sont cueillis à maturité à l’automne (octobre / novembre)

Liliana Puyo | flickr.com
Figure n°3 : La généreuse floraison en corymbe de Hovenia dulcis a lieu en plein été, une période de creux dans les floraisons. Sa production de nectar permet à de nombreux insectes (ici l’abeilles européenne Apis meliffera) de subvenir à leurs besoins en attendant les floraison suivantes
Figure n°4 : Production potentielle de nectar selon les essences et leurs périodes de floraison, Département des ressources forestières de Corée,20204. Traduction de l’auteur.

Notes :

  1. Hyun, Tae Kyung & Eom, Seung & Yu, Chang & Roitsch, Thomas. (2010). Hovenia dulcis – An Asian Traditional Herb. Planta medica. 76. 943-9. 10.1055/s-0030-1249776.
  2. Evreinoff V. A. Notes sur Hovenia dulcis Thunberg. In: Journal d’agriculture tropicale et de botanique appliquée, vol. 5, n°6-7, Juin-juillet 1958. pp. 487-490.
    DOI : https://doi.org/10.3406/jatba.1958.2481
  3. Deux individus sont identifiés sur la carte de arbres de la ville de Paris
  4. La plantation d’espèces mellifères pour améliorer à la fois l’industrie apicole et la santé des écosystèmes, Institut national des sciences forestières de Corée, 2020
  5. Sea-Hyun Kim, Hun-Gwan Chung, & Jingyu Han (2007). A New High Yield Hovenia dulcis var. koreana Nakai Cultivar, “Poong-Sung 1”. 한국육종학회지, 39(3), 337-338.
  6. Présentation des cultivars créés en 2020 sur le blog de la ferme Tapdol à Seosan, Corée.