Le grain de la ville

Décryptages
Publié le 07/04/25
Mis à jour le 07/04/25
3min de lecture
Le grain de la ville
Denis Esakov / Shutterstock.com

En haut : Le Walden 7, à Sant Just Desvern, près de Barcelone par Ricardo Bofill / En bas : Quartier Soho de Manhattan

Il y a des hauteurs qui oppressent, et d’autres qui élèvent. La différence ? Le grain de la ville.

La fine granularité Fine granularité, optionalité et densification Fine granularité, optionalité et densification , c’est tout d’abord ce qui donne une certaine liberté, une certaine autonomie des maîtres d’ouvrages et propriétaires des lieux, qui crée cette capacité d’adaptation et de transformation, parcelle par parcelle, bâtiment par bâtiment, du tissu urbain dans son ensemble.

Le découplage spatial et décisionnel prend appui sur la trame parcellaire, qui s’affine à mesure que la ville se densifie.

C’est cette finesse de la trame parcellaire qui crée l’antifragilité du tissu urbain : le temps, les évènements, les chocs vont renforcer, raffiner la structure du tissu urbain. A l’inverse, les structures urbaines monolithiques sont fragiles, peu évolutives, sauf à grands frais.

La fine granularité a, au-delà de l’antifragilité La fine granularité : clé de l’antifragilité ? La fine granularité : clé de l’antifragilité ? , des propriétés esthétiques particulières. Elle fait émerger une beauté organique, vibrante, qui gagne en profondeur au fur et à mesure que le temps passe et qu’il imprime une marque différente à chaque parcelle, sur chaque bâtiment qui évolue à son rythme, indépendamment de ses voisins.

Cette beauté organique Urbanisme organique : quand la beauté d’une ville vient autant du dessin que du grain Urbanisme organique : quand la beauté d’une ville vient autant du dessin que du grain contraste avec celle, plus plastique et figée, des grands ensembles urbains.

Il se trouve que cette distinction s’applique, en particulier, au sujet de la verticalité en ville.

Alors qu’il ne se passe plus une réunion publique d’urbanisme en France sans que le sujet de la hauteur des constructions projetées soient évoqué par les riverains, pour être négocié à la baisse, on s’est peu interrogé jusqu’ici sur l’acceptabilité sociale de la hauteur du bâti.

Et pourtant, le NIMBY Not In My BackYard (NIMBY) Not In My BackYard (NIMBY) fait rage.

Lorsque nous observons la finesse vibrante des façades du port d’Honfleur (figure n°1), les volets rouges qui dessinent les étages des immeubles qui bordent les quais de la Nive à Bayonne (figure n°2), ou encore l’élancement enthousiaste des immeubles de Manhattan, nous découvrons comment la hauteur, lorsqu’elle est étroite et élancée, c’est-à-dire lorsqu’elle émerge d’une trame parcellaire fine, revêt un tout autre aspect que lorsqu’elle est l’apanage d’un objet urbain plus grand, plus large, plus vaste.


Figure n°1 : Le port d’Honfleur
Source : Loïc Lagarde

Figure n°2 : Les quais de la Nive à Bayonne
Source : C. Gary

La fine granularité est, en quelque sorte, l’antidote de la hauteur réelle des bâtiments : l’élancement fait oublier le nombre des étages.

A la hauteur massive et lourde, s’oppose une hauteur délicate et vibrante.

Si la densité est l’une des clés de la soutenabilité de nos villes, et si l’acceptabilité de la hauteur se révèle décisive pour bâtir cette densité, alors nous devrons retrouver ce chemin qui conduit aux fortes densités — antifragiles — par la fine granularité.

L’histoire urbaine de Manhattan La maison contient en germe le village, lequel contient en germe la ville La maison contient en germe le village, lequel contient en germe la ville a beaucoup à nous apprendre à cet égard ; comme celle, sans doute, des métropoles d’Asie du Sud Est Une boutique, atelier et maison familiale : l’immeuble tout en un à Hanoi Une boutique, atelier et maison familiale : l’immeuble tout en un à Hanoi  : c’est la trame parcellaire, plus que le nombre d’étages, qui conditionne l’acceptabilité de la ville dense.

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