Ce n’est pas le logement qui est en crise mais les droits à bâtir

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3 min de lecture  |  Publié le 12/03/2024 sur | Mis à jour le 05/04/24

What Texas can teach San Francisco and London about building houses

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John Burn-Murdoch | ft.com

Que se passe-t-il lorsqu’on restreint les droits à bâtir dans un secteur à haute attractivité et pourtant sous-densément peuplé ? L’exemple de la Métropole bordelaise

La crise du logement ? Une crise publique de la planification et du droit à construire.

A Mérignac, commune de 75 000 habitants (58 000 emplois, 445 000 dans la métropole) limitrophe de Bordeaux, les prix des maisons dans l’ancien avoisinent les 4 000€/m2.

Ils se situent aux environs de 2 000€/m2 à Périgueux, préfecture de la Dordogne, qui comptent 30 000 habitants et 22 000 emplois (81 000 dans l’agglomération).

Pourtant la densité à Périgueux (35 habitants/ha dans les espaces habités​​) est de 20% supérieure à celle de Mérignac (28 habitants/ha dans les espaces habités) !

Cela signifie qu’à Mérignac, deuxième pôle d’emploi du département de la Gironde, desservie par la rocade, deux gares, le tramway, un réseau de lignes de bus performant et l’aéroport régional, est entretenue une rareté artificielle de l’offre en logements, à travers un règlement d’urbanisme excessivement restrictif.

A Pessac, 67 000 habitants, commune qui jouxte Bordeaux et Mérignac, et bénéficie, elle aussi, d’une desserte par la rocade, une gare, une ligne de tramway et de bonnes lignes de bus, la situation est plus ubuesque encore, avec une densité des espaces habités de 23 habitants/ha, soit 30% de moins qu’à Périgueux… pour un prix des maisons de 4200€/m2 soit, là encore, deux fois plus qu’à Périgueux.

Ce n’est pas tant le logement qui est en crise que la planification et les autorisations de construire

Comme l’observe, chiffres à l’appui, John Burn-Murdoch, journaliste au Financial Times, dans une tribune publiée le 23 février 2024, à propos de la crise du logement américaine :

  • certains États « se disent profondément préoccupés par la crise du logement et le mal logement, mais ils continuent à bloquer la construction de logements, ce qui aggrave la situation ».
  • d’autres « autorisent simplement la construction de nombreux logements et ne connaissent pas de crise du logement »​​.

Murdoch plaide « pour que l’on arrête de parler de crise du logement, et que l’on commence à parler d’une crise de la planification et des autorisations de construire ».

Un point de vue que je partage et développe depuis quelques années en France, constatant à quel point la pénurie de foncier constructible est artificielle, organisée de façon technique et presque invisible pour le citoyen, via l’écriture complexe et sophistiquée des règlements des plans locaux d’urbanisme.

Qu’est-ce qui explique cette différence du simple au double entre les maisons de Périgueux et de Mérignac ?

  1. Les coûts de la construction sont peu ou prou les mêmes à Mérignac et à Périgueux.
  2. Habiter Mérignac permet d’accéder à une myriade d’opportunités culturelles, professionnelles, d’équipements et de services auxquels Périgueux ne donne pas accès.
  3. Malgré cela, Mérignac maintient volontairement des règles d’urbanisme qui empêche la densité habitée de rejoindre celle de Périgueux.

Mérignac est donc beaucoup plus pauvre en offre : les prix du foncier y sont ainsi 4 à 5 fois plus élevés qu’à Périgueux, et le prix des maisons dans l’ancien, 2 fois plus élevé.

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