L’un des plus grands malentendus dans nos débats actuels sur la crise du logement
tient dans le fait que nous confondons :
La résolution de la crise du logement abordable est à portée de main
- le foncier et l’emplacement,
- le logement comme objet (un plancher, des murs et un toit) et le logement comme cadre de vie (un espace habitable situé dans un environnement ayant certaines qualités et dont la localisation donne accès à certaines choses).
Est-ce qu’il viendrait à l’idée d’un commerçant cherchant un local de vente de trouver que le foncier
est cher
?
Qu’il fait l’objet d’une spéculation ?
Non, tout simplement parce que tout le monde sait qu’en matière de commerce, il n’y a que 3 règles :
- l’emplacement,
- l’emplacement,
- et l’emplacement.
Ce n’est pas le foncier qui est cher : c’est l’emplacement, c’est-à-dire l’ensemble des qualités spatiales, sociales et culturelles qui se sont accumulées autour de lui.
Nous commettons une erreur fondamentale lorsque nous évaluons le prix d’un terrain à partir d’un prix au mètre carré.
Nous confondons quantité et qualité.
Le foncier n’est qu’un support physique.
L’emplacement, lui, condense un ensemble de qualités immatérielles : accessibilité, services, vitalité urbaine, paysage, voisinage, réputation.
C’est la densité de ces qualités, patiemment accumulées par l’usage collectif, qui crée la valeur.
Mais dans nos débats publics, nous traitons encore le logement comme un simple produit industriel : un nombre de mètres carrés à produire au moindre coût.
Nous oublions ce que, pourtant, nous savons : un logement sans emplacement désirable n’est qu’une coquille vide. Et inversement : un bon emplacement au sein duquel on maintient un très faible nombre de logements devient un privilège.
C’est là, je crois, que se joue la vraie crise : non pas dans la rareté du foncier, mais dans la concentration spatiale d’une certaine urbanité. De cette urbanité qui est précisément aujourd’hui recherchée par un grand nombre de Français.
Nous ne manquons pas d’espace, nous manquons d’emplacements à la fois bien situés
et capables (morphologiquement, techniquement, règlementairement, c’est-à-dire politiquement) d’accueillir.
Et donc de capacités à en créer de nouveaux.
L’emplacement : c’est sans doute le thème principal de discussion que je retiens de nos échanges d’il y a une petite quinzaine de jours à Rennes lors du colloque Organic Cities 2 : French West Coast.
En particulier ceux que nous avons eu avec Jacques Lévy, Marion Waller et Daniel Behar lors du débat Du Grand Paris à la Grande Côte Ouest
.
Tant que nous parlerons de foncier
, nous continuerons à chercher des terrains.
Quand nous parlerons enfin d’ emplacement
, nous recommencerons à faire de la ville.