Rénovation énergétique : sortir des « mono-gestes »… ou des politiques publiques « mono-objectif » ?
La rénovation aidée ne doit pas être un déversoir à argent public mal utilisé parce qu’employé sans compréhension de la nature des besoins.
Urbanistes et pouvoirs publics au chevet du modèle pavillonnaire français
Isabelle Meijers | lesechos.fr
Fin 2022, Les Echos voyaient les « Urbanistes et pouvoirs publics au chevet du modèle pavillonnaire français ».
N’aurait-il pas fallu titrer l’inverse : « le pavillon – du 21e siècle – au chevet du modèle administratif et urbanistique français ? »
Car oui, la construction de « maisons » sur mesure, projet par projet, à maîtrise d’ouvrage habitante, a de quoi secouer et rafraîchir les vieilles habitudes héritées de l’urbanisme de l’étalement urbain.
Deux articles publiés le 5 décembre 2022 reviennent sur cette solution qui émerge doucement mais sûrement : un nouvel urbanisme « incrémental », qui cherche à opérer des transformations globales en œuvrant dans la dentelle, à la parcelle, dans une logique de sur mesure et d’améliorations itératives du cadre de vie existant, au plus proche des réalités foncières et sociales.
Qu’entend-on par « densification douce » ?
« Il s’agit de la production de nouveaux logements par des opérations qui ne changent pas de manière significative les formes urbaines du quartier, car elles ne nécessitent pas de destruction du parc existant ».
C’est ainsi que Lily Munson décrit ce nouvel urbanisme incrémental dans le 2e article de l’édition du 5/12/2022 intitulé « Les pavillons peuvent-ils résoudre la crise du logement ? ».
La densification douce consiste, en somme, à utiliser les espaces disponibles sur des parcelles déjà construites. Menées avec les propriétaires, ces opérations permettent de valoriser leur patrimoine et de répondre au besoin de logements sans artificialiser de nouvelles terres ni renvoyer les nouveaux habitants à la périphérie des villes.
Densifier sans dénaturer : oui, mais comment ?
Faisant l’objet de travaux de recherche & développement dans plusieurs territoires en France depuis quelques années, cette solution a le mérite de concilier :
La densification douce n’est pas nouvelle : elle est déjà largement à l’œuvre, quoique de façon plus ou moins formelle et avec un manque certain de moyens, d’équipements et d’infrastructures, en Asie, en Afrique, en Amérique du Sud. Des pays qui doivent faire mieux avec moins et qui connaissent, de façon plus cruciale encore, ce problème de la fabrique, en quantité considérable, d’un espace urbain vivable, vivant, de qualité.
Outre-Atlantique, elle débute timidement, aux Etats-Unis et au Canada notamment.
En France, la filière de la densification douce se structure autour d’acteurs comme iudo (micro-promotion), Upfactor (surélévations d’immeubles) et Villes Vivantes (auto-promotion accompagnée) – trois entreprises qui travaillent à développer cette voie des micro-projets de densification douce pour redonner une nouvelle vie aux tissus bâtis existants.
Les opérations pionnières BIMBY et BUNTI de la Ville de Périgueux, de la Communauté Urbaine Creusot Montceau et du SCoT des Vosges Centrales comptent plus de 700 projets de densification douce aboutis, initiés par les habitants, accompagnés par Villes Vivantes et la collectivité.
Peu denses mais bien situés, les quartiers pavillonnaires existants recèlent un gisement de possibilités presque infini pour faire bâtir, projet par projet, des formes urbaines mixtes, diversifiées et durables.
Avec plus de 9 millions de maisons, les villes de plus de 10 000 habitants et leurs communes limitrophes constituent des territoires de choix pour poursuivre ces expérimentations et lancer le passage à l’échelle de la densification douce.
En quoi la maison individuelle constitue-t-elle l’outil idéal au service de la densification douce et de la miniaturisation de l’industrie immobilière ?
Comme expliqué dans un article de La Grande Conversation, la maison individuelle construite sur des lots libres denses a déjà eu l’occasion de loger les ouvriers et leurs familles dans les faubourgs des villes en expansion. C’était notamment le cas au moment de l’exode rural provoqué par la révolution industrielle, qui a donné naissance à la mancelle, au Mans, mais aussi à l’échoppe bordelaise. Entre 1850 et 1880, cette dernière a représenté les deux tiers des nouvelles constructions produites, tout en réussissant à former un habitat populaire et abordable, aujourd’hui plébiscité par les classes les plus aisées de la métropole.
150 ans plus tard, il semble que la maison du XXIe siècle, celle qui se love dans les jardins existants, s’épanouit sur les toits et se glisse entre deux maisons, soit aujourd’hui en mesure de jouer un rôle analogue : changer la donne en matière de production de logements abordables et aider les collectivités françaises en tension à absorber, en douceur, une demande beaucoup plus importante qu’elles ne savent le faire aujourd’hui.
Les besoins sont urgents. Les réponses opérationnelles presque prêtes.
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