Construire plus (compact) pour avoir moins chaud ?

Décryptages
Publié le 27/03/25
Mis à jour le 07/04/25
2min de lecture
Construire plus (compact) pour avoir moins chaud ?
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Cordoue, Espagne

Saint-Aubin-de-Médoc a inauguré, en juillet 2024, une voie de bus express toute neuve reliant cette petite commune de 7’500 habitants à la gare SNCF de Bordeaux !

Mais, interrogé fin février par le magazine Le Point sur les raisons qui le poussent à freiner la densification du tissu urbain, le maire de Saint-Aubin répond, sans ambage, avec les éléments de langage qui semblent devenus la vulgate de l’adaptation des villes françaises à la hausse des températures, en même temps que d’un certain souhait de ne pas trop construire…

 Nous sommes attentifs à l’artificialisation des sols, y compris à l’échelle de la parcelle, et nous ne voulons pas subir un phénomène d’îlot de chaleur urbain, comme c’est le cas dans les quartiers d’échoppes en centre-ville de la métropole. 

Et le journaliste de rappeler que

 Bordeaux compte 5’300 habitants au km2, Saint-Aubin-de-Médoc seulement… 218. 

Ainsi, l’atténuation des îlots de chaleur urbains est-elle devenue l’un des arguments phares que l’on oppose aujourd’hui à la densification ; il est donc utilisé, à l’inverse, pour :

  • figer les tissus pavillonnaires des premières couronnes des agglomérations, pourtant bien desservis par les transports en commun,
  • relancer l’étalement urbain, l’artificialisation de nouvelles terres, l’allongement des distances domicile travail et donc l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre… et ainsi le réchauffement climatique Face aux canicules : faut-il planter ou densifier ? Face aux canicules : faut-il planter ou densifier ?  !

Pourtant, les recherches effectuées sur l’adaptation de la morphologie des villes espagnoles aux climats locaux montrent que c’est bien le bâti qui est prioritairement employé pour créer un dispositif puissant de climatisation passive dans les villes les plus chaudes, ce qui va à l’encontre de l’idée qu’il faudrait construire moins, moins dense et s’en remettre presque exclusivement à la végétation pour avoir moins chaud l’été.

Dans les villes espagnoles, plus il fait chaud,

  • plus les parcelles sont fortement bâties (des cours très étroites, de 9m2 en moyenne à Cordoue) ;
  • plus les cours sont fréquentes (82% des parcelles bâties à Cordoue).

La protection contre les fortes chaleurs estivales n’est ainsi pas assurée par une densité faible et un bâti lâche mais, au contraire, par une morphologie urbaine extrêmement compacte, très imperméabilisée, bâtie et ombragée (le rapport hauteur sur largeur, dans les cours comme dans les rues, est une des clés pour se protéger de l’exposition au rayonnement solaire direct).

Ainsi, plus les étés sont chauds, plus l’organisation du bâti des centres villes privilégie la multiplication des petites cours (plus de 1’000/km2) pour maximiser les microclimats frais, tandis que dans les régions plus tempérées, l’organisation du bâti tolère des cours moins compactes et moins fréquentes, en cohérence avec le moindre besoin de régulation thermique.

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