Quand le « bon sens » et le « héros » remplacent l’apprentissage : le cas du logement

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Publié le 19/12/25
Mis à jour le 19/12/25
2min de lecture
Quand le « bon sens » et le « héros » remplacent l’apprentissage : le cas du logement
Image du haut : Jef Poskanzer / Image du bas : Bertrand Lapègue

Image du haut : manifs pro et anti-SB827 (YIMBY) à San Fransisco / Image du bas : mobilisation "Se loger" des associations, syndicats, partis politiques au Pays Herrian Bizi

    Suite à la publication de la tribune collective  Le camp du OUI , une question revient comme un réflexe, souvent dans le camp du  OUI MAIS  :

     Produire du logement… oui mais pour qui ? 

    Cette question semble relever du bon sens. Et pourtant.

    Dans un monde où la majorité des sciences contemporaines sont sectorielles, unidimensionnelles, et peinent à être utiles face à des objets aussi complexes que la ville ou le logement, le  bon sens  et le  génie individuel  ont un point commun fondamental : ils sont fondamentalement systémiques.

    Le bon sens est capable, intuitivement, de tenir ensemble la construction, l’économie, le social, l’espace et la géographie, le politique et le temps long. Le héros génial ou courageux a les mêmes aptitudes, que les sciences n’ont pas : il peut casser les silos, assembler les dimensions et produire une synthèse, ici et maintenant.

    Mais si le  bon sens  et le  héros  surgissent, c’est parce que l’apprentissage collectif en urbanisme s’est effondré.

    Ils sont donc devenus les parfaits substituts (ils ne demandent d’effort à personne…) à la connaissance.

    Puis de simples substituts, ils sont devenus de vrais obstacles cognitifs :

    • puisque  c’est simple , pourquoi chercher à modéliser la complexité ?
    • puisque  il suffit d’une volonté politique forte pour choisir, et normer , pourquoi tester, comparer, corriger ?

    La question  produire du logement pour qui ?  suppose implicitement :

    • que l’on puisse cibler finement les habitants avec certains produits,
    • et donc que le marché local du logement soit simple et prévisible.

    Or la réalité contemporaine montre l’inverse :  se loger  est devenu un écosystème complexe, incompréhensible pour les approches sectorielles.

    • l’effondrement du neuf désorganise le locatif ancien,
    • les arbitrages se font à l’échelle des bassins de vie,
    • les effets de chaîne dominent les intentions.

    Dans ce contexte, mouvement YIMBY est plus intéressant qu’il n’y paraît.

    Dans un système complexe, dire OUI, c’est :

    • accepter l’incertitude,
    • laisser des marges d’adaptation aux acteurs,
    • permettre l’auto-organisation partielle,
    • apprendre de ces mécanismes pour réguler en chemin (la régulation comme feedback).

    Au contraire, dire NON (= OUI MAIS) en se basant sur des considérations simples (et courageuses) consiste à tenter de paramétrer un système que l’on comprend mal…

    Ces dispositifs de tri sont pris en otage par des minorités puissantes (les NIMBYs) capables de bloquer l’ensemble du système à leur profit.

    Pour qui veut bien s’y intéresser, le mouvement YIMBY, et ses développements organiques dans de nombreux pays, constitue aujourd’hui l’un des rares espaces d’apprentissage systémique sur le logement :

    • croisement des disciplines,
    • confrontation des données de terrain aux débats politiques et scientifiques.