Introduction d’abeilles mellifères en milieu urbain : attention aux effets rebond !

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2 min de lecture  |  Publié le 08/02/2023 sur | Mis à jour le 05/02/24

Decline in wild bee species richness associated with honey bee (Apis mellifera L.) abundance in an urban ecosystem

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MacInnis G, Normandin E, Ziter CD | Peerj.com

Après Paris1, c’est à Montréal qu’on démontre que l’élevage d’abeilles mellifères peut se révéler défavorable aux abeilles sauvages en milieu urbain.

Gilles Lecuir, Département Biodiversité de L’Institut Paris Région

L’étude publiée en 2023 par MacInnis et al. à Montréal2 arrive aux mêmes conclusions que des études précédentes qui avaient amené d’autres villes à revoir leurs plans d’actions en matière d’amélioration de la biodiversité en ville.

Dès 2018, la ville de Metz a notamment revu son approche des ruches en ville3, en limitant strictement le nombre de ruchers au regard des ressources florales disponibles, pour limiter la compétition avec les populations d’abeilles sauvages.

En 2022 en Suisse, une étude établie sur le suivi du nombre de ruchers au regard des ressources disponibles pour les abeilles sur 6 années et dans 14 villes a démontré que le nombre de ruches avait presque doublé sur la période, pour des ressources florales équivalentes, aboutissant à la conclusion que trop de ruches en ville était néfaste à la biodiversité4.

En 2022 à Nantes, François Meurgey, entomologiste au muséum d’histoire naturelle de Nantes, alertait lui aussi le sujet de la multiplication des ruches dans la métropole nantaise, qualifiant cette démarche de “fausse bonne idée”5.

“Aujourd’hui, à cause de la fragmentation des habitats et des pesticides des agriculteurs, les abeilles sauvages quittent les campagnes pour trouver refuge en ville. On en dénombre environ 150 espèces à Nantes. Sauf qu’avec la multiplication des ruches et l’explosion des abeilles domestiques, elles se font chasser. Et c’est un vrai problème !”

Les écosystèmes urbains sont trop complexes (vivants) pour se prêter à des approches aussi simples que d’attribuer de façon “automatique” des vertus en faveur de la biodiversité à l’installation de ruches en ville.

Voilà une illustration frappante des effets rebond que peuvent produire des politiques environnementales qui ne sont pas ancrées dans les connaissances que nous apportent la recherche scientifique.


RÉFÉRENCES

  1. Ropars L, Dajoz I, Fontaine C, Muratet A, Geslin B (2019) Wild pollinator activity negatively related to honey bee colony densities in urban context. PLoS ONE 14(9): e0222316. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0222316 ↩︎
  2. MacInnis G, Normandin E, Ziter CD. 2023. Decline in wild bee species richness associated with honey bee (Apis mellifera L.) abundance in an urban ecosystem. PeerJ 11:e14699 https://doi.org/10.7717/peerj.14699 ↩︎
  3. Savez-vous pourquoi Metz a créé seulement 12 ruches en ville ?, Le Républicain Lorrain, 27 octobre 2021 ↩︎
  4. L’apiculture urbaine pourrait nuire aux abeilles, News WSL, 14 février 2022 ↩︎
  5. « Jusqu’où va-t-on continuer d’installer des ruches partout ? C’est aberrant ! », Ouest-France, 22 juillet 2022 ↩︎