Le NIMBY contre l’efficacité foncière ?

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3 min de lecture  |  Publié le 13/09/24

Redd F | Unsplash

Dans un environnement favorable à l’efficacité foncière, celle-ci progresse partout… Sauf, ces dernières années, dans les zones les plus tendues. Le NIMBY est-il en cause ?

Entre raréfaction du foncier constructible, hausse des taux d’intérêt et des coûts de construction, tout nous porte à améliorer notre efficacité foncière, pour des raisons environnementales — préserver les terres naturelles et agricoles, à travers la mise en œuvre du Zéro Artificialisation Nette — mais aussi pour permettre aux Français de financer leur projet de construction dans un contexte où leur budget s’est contracté.

Et c’est effectivement ce que les données du SDES confirment : les terrains achetés entre 2019 et 2022 pour y construire des maisons individuelles affichaient une surface médiane de 670 m² — soit une baisse de 18% en dix ans.

Fait étrange cependant, dans les zones les plus tendues du territoire (classées A et A bis dans le zonage ABC en vigueur), la taille médiane des terrains est repartie à la hausse pour atteindre 542 m² en 2019-22, après avoir atteint un point bas à 519 m² en 2016-19. C’est évidemment une anomalie.

On pourrait y voir un effet des migrations résidentielles post-Covid, en provenance des cœurs de ville dense et en direction des premières couronnes des grandes agglomérations. Mais, même si ce phénomène s’est bien produit, il est resté marginal et n’explique pas la part des terrains de plus de 750 m² vendus là où le mètre carré constructible est le plus cher. En 2019-22, ces grands terrains représentaient 27.6% des ventes en zone A et A bis contre 18.4% en zone B1, et 26.5% en zone B2.

Une autre explication semble tenir la corde : malgré la loi ALUR de 2014, qui a supprimé le COS et le minimum parcellaire, un certain nombre de communes en zone tendue continuent à imposer, dans la pratique, une taille minimale de terrain pour avoir le droit d’y construire une maison. De façon formelle (par un assemblage de règles dont la combinaison entraîne in fine l’impossibilité de construire sur de petits terrains) ou plus officieuse (par intimidation des porteurs de projet en amont des dépôts de demande de permis de construire), certains élus et leurs équipes techniques continuent de pratiquer un urbanisme plus soucieux de préserver la tranquillité de riverains tatillons que de mettre en œuvre le paradigme qui prévaut depuis la loi ALUR : protéger les terres naturelles et agricoles en favorisant le renouvellement de la ville sur la ville plutôt que l’extension urbaine.

Nous l’avons observé, par exemple, dans plusieurs communes de la métropole bordelaise : on y pratiquait, encore l’année dernière, un minimum parcellaire de fait qui interdisait de construire une maison sur un terrain de moins de 500 m².

C’est ce genre de pratique qui, malgré les lois successives — la dernière en date étant la loi Climat et Résilience instaurant le principe du ZAN — expliquent pourquoi nos documents d’urbanisme offrent aujourd’hui, dans les zones tendues, moins de possibilités de densifier le tissu urbain existant qu’il y a 10 ans.

Une opposition politique forte visant à empêcher la densification des communes les plus recherchées contraint ainsi les élus locaux à multiplier les règles qui bloquent les projets de celles et ceux qui n’ont pas les moyens d’acquérir de grands terrains en zone tendue.

Ces derniers sont alors contraints de renoncer à leur rêve de maison avec jardin ou de s’éloigner, en deuxième couronne ou plus loin encore, ce qui contribue à engorger nos réseaux routiers urbains avec les conséquences économiques et environnementales que cet étalement urbain et ces mobilités subies impliquent.

À l’heure où l’efficacité foncière progresse presque partout en France, il est grand temps de nous interroger sur les mécanismes qui conduisent le NIMBY a emporter la mise sur le devenir de territoires qui comptent parmi les plus stratégiques pour que la France puisse à la fois atteindre ses objectifs environnementaux et créer les richesses nécessaires à sa prospérité.

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