Relancer la construction dans les zones pavillonnaires ? C’est en tout cas le désir d’une large majorité de Français : les 3/4 d’entre eux font de la maison individuelle leur idéal1, comme le rappelait Lily Munson dans un article de L’Obs, fin février 2024.
Il n’y a pas « une » mais mille maisons
Si l’on définit une “maison” comme un logement produit à l’unité, sur mesure… alors il n’y a pas une maison mais mille maisons.
Nos travaux de R&D nous montrent une chose simple, qu’illustre ce graphique : la maison de 2024 a le visage de ses habitants. Sa force réside dans le fait qu’en étant bâtie à l’unité, pour une maîtrise d’ouvrage habitante dont les besoins sont spécifiques, elle est capable de s’adapter, par une conception sur mesure, au contexte, aux souhaits, au programme, aux moyens de chacun.
Lorsque l’on observe la répartition des 2 000 projets accompagnés au cours de l’année 2023 par Villes Vivantes, en termes de surfaces habitables créées (de gauche à droite sur le graphique ci-dessus), de surface de terrain sur lesquelles ces logements ont été construits ou restructurés (de bas en haut sur le graphique ci-dessus, avec une échelle logarithmique), mais aussi l’âge des personnes qui ont porté ces projets (la couleur des points), alors on n’observe aucune loi.
On trouve en effet :
des toutes petites surfaces dans de grands terrains,
et inversement, de grandes surfaces à vivre avec très peu de surface de terrain,
mais aussi toutes les configurations intermédiaires,
par et pour tous les profils d’âge.
Le sur mesure n’est pas un mot trop fort
Produire une offre personnalisée, vraiment adaptée aux besoins sur mesure des ménages, n’est pas une ambition jetée en l’air : elle est nécessaire pour mieux optimiser, faire un usage raisonné et raisonnable des ressources.
Derrière le mot maison, donc, voyons le changement de modèle de la production immobilière en France, sa miniaturisation.
“Oui, le pavillon fait partie du rêve français !” : ce retour en grâce dont la maison fait l’objet dans le débat public, depuis que Gabriel Attal et Guillaume Kasbarian ont décidé d’en faire l’un des axes de leur politique, contre-disant sur ce point les 2 ministres du logement précédents, a jeté un certain flou dans le monde de l’aménagement du territoire. Il a ouvert un débat : faut-il relancer la construction de pavillons ?
La question n’est pas tant celle du mot que du mode de production
Les experts discutent aujourd’hui de savoir s’il ne faudrait pas veiller à distinguer :
la maison, qui peut se décliner en “maison de ville”, en “maison de village”, ou encore “maison de bourg”, et qui serait compatible selon eux avec les formes urbaines denses, compactes et sobres en foncier que nous allons devoir mettre en oeuvre dans les années à venir, notamment dans le paradigme du ZAN,
du pavillon, qui cristallise la version honnie, par les urbanistes et les politiques publiques, de la maison “individuelle”, c’est-à-dire sa version détachée, isolée au beau milieu de sa grande parcelle et fortement consommatrice d’espace.
Je pense qu’à l’ère du renouvellement urbain, la question n’est pas celle-là. Elle est de savoir si nous produisons :
en série ou à l’unité,
pour des habitants théoriques qui constituent un segment du marché, ou pour des habitants réels qui seront les maîtres d’ouvrage de leur habitat.