Urbanisme organique : la générosité et l’hospitalité récursives

Décryptages
Publié le 27/05/25
Mis à jour le 27/05/25
3min de lecture
Urbanisme organique : la générosité et l’hospitalité récursives
Ludwig Passini

Anne Passini sur le balcon du Palais Priuli à Venise - 1866

Je suis tombé sur cette aquarelle de Ludwig Passini — Anne Passini sur le balcon du Palazzo Priuli à Venise, 1866 — et je crois qu’elle résume, à elle seule, une série de points que j’ai tenté de formuler ces dernières semaines sur les logiques spatiales de l’urbanisme organique.

Je les prends dans le désordre.

1. Partir des usages Que se passe t-il lorsqu’on raisonne sur des Français théoriques, habitant des logements théoriques ? Que se passe t-il lorsqu’on raisonne sur des Français théoriques, habitant des logements théoriques ?  : cela transparaît de façon lumineuse sur l’image, l’urbanisme organique, c’est en fait un ensemble d’usages devenus habitudes, immeubles, villes, territoires.

Depuis un simple balcon d’angle, jusqu’aux routes des vacances dans le Sud.

2. Faire place à la redondance Antifragilité : éloge de la redondance Antifragilité : éloge de la redondance , la volupté : parmi ces usages, certains relèvent de la nécessité, d’autres de l’utilité, d’autres du plaisir.

L’urbanisme organique ne juge pas à priori qui relèvent des uns, ou des autres. Il assume le côtoiement de l’abondance et de la rigueur. C’est cet ensemble d’économies et de dépenses inconsidérées qui forment un tout vivant. Qui nous ressemble. Et c’est la raison pour laquelle il nous faut nous méfier de la sobriété morale Le piège de la sobriété simple Le piège de la sobriété simple envisagée comme une sorte de réflexe rédempteur.

3. Choisir nos dépenses, et pas seulement nos économies.

Car, comme nous le rappelle Florent Laroche, toute  économie  réalisée ici est réinvestie ailleurs, dans un sorte de  transfert de consommation Économiser pour consommer plus : la face cachée de la sobriété Économiser pour consommer plus : la face cachée de la sobriété   permanent.

Pour limiter notre impact, la question est donc tout autant de choisir nos économies (sobriété) que de décider d’allouer ces ressources économisées à des dépenses coûteuses (en temps, en argent) mais peu impactantes sur l’environnement.

La beauté est l’un de ces investissements  superficiels  qui méritent d’être regardés sous cet angle : la fierté, la dignité, le rayonnement demandent des débauches de moyens. Mais ceux-ci peuvent bénéficier à tous, via l’espace public. Et ils ne seront pas « dépensés » ailleurs.

4. Dans chaque cité, observons ce lien : la densité urbaine s’accompagne d’un investissement massif et généreux dans la beauté. La densité coûte cher. D’autant plus cher qu’elle est décorée La décoration au service de la densité La décoration au service de la densité . Mais c’est ainsi qu’elle devient vivable, désirable et recherchée.

Et qu’un mètre carré de vie dense finit par avoir plus de valeur Abonnement « invisible » : dans le coût d’un logement, combien pèse son emplacement ? Abonnement « invisible » : dans le coût d’un logement, combien pèse son emplacement ? que cinq mètres carrés de vie diluée.

5. A Paris, le métro, et l’ornementation des façades, sont les deux faces d’une même pièce : un niveau rare d’intensité urbaine Il vaut mieux densifier que rénover Il vaut mieux densifier que rénover . Et c’est bien dans ce type d’environnement que le bilan carbone des mobilités du quotidien s’effondre, avec la part modale de la voiture.

6. Ce niveau de densité, associé à ce niveau de plaisir sensuel de la densité, s’obtient par des processus récursifs (les processus se répètent et transforment l’ensemble à chaque itération) qui produisent des formes  fractales Mais à quoi sert qu’une ville soit « fractale » ? Mais à quoi sert qu’une ville soit « fractale » ?  .

Le balcon d’angle du Palais Priuli illustre à merveille cette idée de la récursivité La ville n’est jamais produite d’un seul geste La ville n’est jamais produite d’un seul geste  : ornement de l’immeuble, il est lui même orné. Par des éléments eux-mêmes ornés, etc.

Rejoignez la discussion